
Loyers d’avance dans les baux commerciaux : pas de baisse automatique de la valeur locative
Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a rappelé une règle importante en matière de baux commerciaux : le paiement de loyers d’avance au-delà de deux termes n’entraîne pas nécessairement une diminution de la valeur locative du bien loué.
En l’espèce, un locataire demandait une réduction du loyer lors du renouvellement du bail. Il invoquait une charge excessive, composée de loyers trimestriels payables d’avance et d’un dépôt de garantie équivalant à six mois de loyers, soit au total environ neuf mois de loyer versés à l’avance. Il estimait que cette contrainte financière justifiait une minoration de la valeur locative, conformément à l’article R. 145-8 du Code de commerce.
La Cour rejette cet argument. Elle rappelle que l’article L. 145-40 du Code de commerce prévoit une contrepartie légale : les sommes payées d’avance au-delà de deux termes donnent droit à des intérêts au profit du locataire, au taux fixé par la Banque de France. Cette obligation de rémunération du bailleur neutralise l’impact de la charge supplémentaire sur la valeur locative. Ainsi, dans le cas d’un loyer trimestriel, trois trimestres versés d’avance ne violent pas la législation, dès lors que le bailleur verse les intérêts légaux.
La jurisprudence est constante : seule l’absence de contrepartie à des obligations dépassant les usages ou la loi peut justifier une baisse de la valeur locative. En l’absence d’irrégularité ou de déséquilibre contractuel manifeste, le versement de loyers d’avance ne suffit pas.
Il est également précisé que les garanties non constituées par des sommes versées directement au bailleur, comme un dépôt sur un compte bloqué, ne donnent pas droit à intérêts. En revanche, si elles excèdent les obligations usuelles sans contrepartie, elles peuvent affecter la valeur locative.
Enfin, un projet de loi de simplification économique (n° 550) prévoit de limiter le montant des garanties pouvant être exigées du locataire commercial. Cette réforme pourrait impacter la pratique des baux commerciaux et sécuriser davantage les preneurs.
En conclusion, le paiement de plusieurs mois de loyers d’avance ne constitue pas un facteur automatique de diminution de la valeur locative, dès lors qu’une contrepartie légale est prévue. Il appartient aux parties de veiller à l’équilibre contractuel et de se conformer strictement aux règles du Code de commerce.